Après la bataille de victor hugo

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
C’était un Espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
Et qui disait:  » A boire! à boire par pitié !  »
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit: « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé.  »
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant: « Caramba!  »
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
« Donne-lui tout de même à boire », dit mon père.

Victor Hugo

Après la bataille

February 20, 2009 at 11:47 pm blackmamba

Victor Hugo

Listen (to Cyrano read)

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
C’était un Espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
Et qui disait: ” A boire! à boire par pitié ! ”
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit: “Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. ”
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant: “Caramba! ”
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
” Donne-lui tout de même à boire “, dit mon père.

There is a poetic English translation floating around on the net, but I find it a little contrived, and somewhat too far from the original. You’ll find it easily if you search for “After the Battle Victor Hugo”. I really like the fact that Hugo’s text flows easily and sounds pretty natural. So I’ll give you a verse by verse, pretty much a word for word translation.

After the battle

My father, a hero with such a sweet smile,
Followed by a single soldier whom he liked amongst all,
For his great bravery and his tall stature,
Was wandering on his horse, on the evening of a battle,
Across the field covered with bodies upon which night was falling.
He thought he heard a soft noise in the shadows.
It was a Spaniard from the routed army,
Who was crawling in his blood on the side of the road,
Groaning, broken, livid and more than half dead,
And who was saying: “Something to drink! Take pity, a drink!
My father, moved, gave to his faithful soldier
A flask of rum which hung from his saddle,
And said, “Take it and give a drink to the poor wounded man.”
All of a sudden, as the lowered soldier
Was bending towards him, the man, some kind of Moorish,
Steadies a pistol that he was still holding
And aims at my father’s forehead while shouting: “Caramba!”
The bullet went so close that the hat fell off
And the horse suddenly backed off.
“Give him a drink anyway” said my father.

Around 1800, Victor Hugo’s father was a general in the armies of Napoleon which invaded most of Europe to bring liberty, equality and brotherhood to the people oppressed in the neighboring countries. Surprisingly, the locals did not alway appreciate the wonderful presents that were forced upon them by foreigners. We now know better and such mistakes would not be repeated in the 21st century, but I digress.
This is a moving story told very efficiently as a modern filmmaker would. This would have made a great Kurosawa. Three shots. The camera pans across the bloody battlefield barely lit by an evening sky. Then the camera zooms in to the wounded Spaniard that we discover, low and back lit. Then a quick action scene, the explosion of a bullet, the camera follows the hat that flies off. As the camera zooms back out to the whole landscape, the famous last line is heard in a tired and weary voice, “Give him a drink anyway”.
This poem is quite famous in French speaking countries and several verses are often quoted, most notably the last one, when someone has a generous gesture for a fallen foe, –or cynically, whenever there is wine to be served, a common occurrence.

– Cyrano

Welcome Cyrano! Looking forward to more great readings from you! 🙂

[blackmamba]

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Entry filed under: Black Mamba, Cyrano, French, Victor Hugo.

Victor HUGO
1802 – 1885

Après la bataille

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
C’était un Espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
Et qui disait:  » A boire! à boire par pitié ! « 
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit: « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. « 
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant: « Caramba! « 
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
 » Donne-lui tout de même à boire « , dit mon père.

I

APRÈS LA BATAILLE

Mon père, ce héros au sourire si doux, Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille, Parcourait à cheval, le soir d’une bataille, Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit. Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit. C’était un Espagnol de l’armée en déroute Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,

Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié,
Et qui disait : « À boire ! à boire par pitié ! »
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit : « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. »
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : « Caramba ! »
Le coup passa si près, que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
« Donne-lui tout de même à boire, » dit mon père.