Présentation de la pièce
Cyrano de Bergerac est une pièce en vers en cinq actes écrite par Edmond Rostand et représentée pour la première fois en 1897. Elle s’inspire très librement de la vie et de l’oeuvre de Savinien de Cyrano de Bergerac, écrivain libertin du XVIIème siècle. Il s’agit de fait d’un immense poème de 2600 alexandrins, avec des rimes simples, qui regorge de figures de style telles qu’antithèse, allégorie, métaphore, périphrase…
Puisqu’elle renferme une cinquantaine de personnages, la pièce est difficile à mettre en scène, pour plusieurs raisons :
- il y a une cinquantaine de personnages
- le rôle titre doit répliquer plus de 1 600 alexandrins
- les décors diffèrent beaucoup d’un acte à l’autre
- il y a une scène de bataille
La pièce, malgré son essence romantique, genre qui est passé de mode en cette fin de XIXème siècle, rencontre un énorme succès. On peut la qualifier de comédie héroïque, disconvenant aux trois unités de temps, de lieu et d’actions qui caractérisaient le théâtre classique.
Ainsi :
- Acte I : 1640, à l’Hôtel de Bourgogne, un théâtre parisien, pendant la représentation d’une pièce (procédé de la mise en abime : une pièce de théâtre dans une pièce de théâtre)
- Acte II : Boutique du rôtisseur-pâtissier Raguenau
- Acte III : Une place de Paris, dans le Marais, en face du balcon de la maison de Roxane
- Acte IV : Le Camp des cadets de Gascogne, proche du siège d’Arras
- Acte V : 1655, au milieu du jardin du couvent parisien qui accueille Roxane depuis la mort de Christian
La pièce est rythmée par des moments décisifs, sans qu’elle comporte une véritable intrigue à proprement parler. Aussi le spectateur assiste-t-il à :
- la scène du duel de poètes entre Cyrano, le héros, bel esprit et fine lame, et Valvert, pédant
- la scène du balcon qui représente un archétype de la scène d’amour (on pensera à Roméo et Juliette) mais innovant chez Rostand puisque le courtisan est représenté par deux hommes différents
- la scène finale de la gazette où Cyrano, mourant, avoue son amour à Roxane
Les meilleurs professeurs de Français disponibles
Cristèle
/h
75€
1er cours offert !
Sophie
/h
40€
1er cours offert !
Julie
/h
75€
1er cours offert !
Albane
/h
65€
1er cours offert !
Konan pacome
/h
35€
1er cours offert !
Valentine
/h
50€
1er cours offert !
Koffi felicien
/h
20€
1er cours offert !
Chrys
/h
87€
1er cours offert !
Cristèle
/h
75€
1er cours offert !
Sophie
/h
40€
1er cours offert !
Julie
/h
75€
1er cours offert !
Albane
/h
65€
1er cours offert !
Konan pacome
/h
35€
1er cours offert !
Valentine
/h
50€
1er cours offert !
Koffi felicien
/h
20€
1er cours offert !
Chrys
/h
87€
1er cours offert !
Résumé par actes
Acte I – « Une représentation à l’hôtel de Bourgogne»
Dans le théâtre de Bourgogne, un public très fourni s’apprête à découvrir La Clorise, une pastorale de Balthasar Baro. Dans les spectateurs, on trouve de tout : des soldats, des petits bourgeois, de grands bourgeois mais, surtout, un père qui amène son fils pour la première fois au théâtre. Il y a là aussi Roxane, jeune femme distinguée et à l’allure prétentieuse, Christian de Neuvillette, un jeune noble de province qui l’aime en secret, ainsi que le comte de Guiche, qui a entrepris de marier Roxane à l’un de ses amis, le Marquis Valvert.
Le rideau se lève. La Clorise commence. Lorsque Montfleury, l’un des acteurs de la pièce, déclame sa première tirade, Cyrano, cousin de Roxane, interrompt la représentation et chasse l’acteur de la scène. Valvert croit alors bon de se moquer de son nez ; mais Cyrano réplique par une merveilleuse tirade qui célèbre son appendice (c’est la fameuse : « C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! / Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! »). C’est donc Valvert qui finit par être la risée de l’assemblée, car il lui manque la répartie de son adversaire.
Cyrano, malgré sa laideur, aime Roxane en secret ; et c’est un bonheur pour lui d’apprendre qu’elle lui donne un rendez-vous pour le lendemain.
Acte II – « La rôtisserie des poètes »
Cyrano et Roxane se retrouvent chez le restaurateur Ragueneau, ami de cette dernière. Les deux cousins évoquent leur enfance heureuse avant qu’elle lui révèle aimer Christian de Neuvillette, dont elle ne connaît que le nom et à qui elle n’a jamais parlé. Mais, selon ses dires, un seul regard, échangé lors d’une représentation à la Comédie, a suffi pour que le charme s’établisse. Ce jeune homme, par ailleurs, vient juste d’intégrer la compagnie de Cyrano comme cadet : elle lui demande de le protéger. Cyrano, bien que désespéré, accepte.
Lorsqu’il rencontre le promis, il se prend de sympathie pour lui, l’estimant courageux. Mais ce dernier a un cruel manque, lui dit-il : il ne sait pas comment parler d’amour. Cyrano offre alors de l’aider à séduire Roxane, en écrivant à sa place les lettres d’amour. Christian, ravi, accepte.
Acte III – « Le baiser de Roxane »
Christian est certes un bel homme courageux mais lorsqu’il s’agit de femme, il devient incapable de rien. Aussi, lorsqu’il se trouve sous le balcon de Roxane, c’est Cyrano, caché, qui lui souffle la déclaration d’amour qu’il fait à sa belle. Il finit même par prendre la place de Christian, profitant de l’obscurité de la soirée. Celle-ci tombe sous le charme d’un si bel esprit.
En parallèle, Roxane résiste à toutes les avances de Guiche, qui s’apprête à partir à la guerre avec son régiment. Cette même échéance lui fait craindre le départ de Christian, raison pour laquelle elle veut avancer le mariage. De Guiche, comprenant la situation, se venge en envoyant Cyrano de Bergerac et Christian de Neuvillette combattre au siège d’Arras.
Acte IV – « Les Cadets de Gascogne »
Au siège d’Arras, les gascons se retrouvent affamés par les troupes espagnoles. Ils perdent doucement espoir. Cyrano, quant à lui, passe au travers des lignes ennemies, au péril de sa vie, pour apporter à Roxane des lettres écrites par lui et signées du nom de Christian.
Roxane, touchée par les lettres, réussit, par l’entremise de Ragueneau, à voyager jusqu’à Arras dans un carrosse débordant de nourriture. Son but : témoigner à Christian tout l’amour qu’elle lui porte. Mais lorsque celui-ci apprend l’existence des lettres, il comprend que Cyrano est également amoureux de sa promise. Dans le même temps, il réalise que Roxane aime le poète caché derrière les lettres, et non pas lui.
Alors Christian exige que Cyrano se confesse à Roxane avant d’aller à l’assaut des troupes espagnoles et de se faire tuer. Il rend son dernier souffle dans les bras de Roxane, tout en lui confiant une ultime lettre, évidemment rédigé par son compagnon d’armes. Celui-ci, malgré tout, décide de tenir son secret tu.
Acte V – « La Gazette de Cyrano »
Nous retrouvons Roxane quinze années plus tard, retirée dans un couvent, son amour pour Christian toujours vif. Cyrano, lui aussi toujours troublé par son sentiment, lui rend fréquemment visite. Le jour de la scène, il est réchappé d’un attentat, mais a été touché à la tête. De fait, lorsqu’il arrive à Roxane, il est déjà en train de mourir, mais il ne prévient pas Roxane.
Il lui demande s’il peut lui lire l’ultime lettre de Christian. Tant son élocution et son émotion sont hautes, Roxane s’interroge : n’est-ce pas là la voix qu’elle entendait sur son balcon ? Et, tandis que la nuit tombe et qu’il devient impossible de lire, Cyrano continue ses mots, qu’il connaît par coeur. Roxane réalise alors que le vrai objet de son amour n’était pas Christian, mais bien plutôt Cyrano de Bergerac ; elle comprend que son sentiment provenait de la grandeur d’âme plutôt que de la beauté extérieure. Et, à la faveur de cet amour soudain révélé, Cyrano peut mourir heureux.
Pistes d’analyse
Une comédie de la laideur
Cyrano est avant tout défini par son nez : dès lors qu’il apparaît, son visage suscite la moquerie blessante et les rires qui vont avec. Son appendice est proprement burlesque, puisqu’il fait directement référence aux masques de la commedia Dell’Arte. Nous pouvons citer la manière dont le décrit, au début de la pièce, un ami de Cyrano :
Ragueneau
« Certes, je ne crois pas que jamais nous le peigne
Le solennel monsieur Philippe de Champaigne ;
Mais bizarre, excessif, extravagant, falot,
Il eût fourni, je pense, à feu Jacques Callot
Le plus fol spadassin à mettre entre ses masques :
Feutre à panache triple et pourpoint à six basques,
Cape que par derrière, avec pompe, l’estoc
Lève, comme une queue insolente de coq,
Plus fier que tous les Artabans dont la Gascogne
Fut et sera toujours l’alme Mère Gigogne,
Il promène en sa fraise à la Pulcinella,
Un nez !… Ah ! Messeigneurs, quel nez que ce nez-là !…
On ne peut voir passer un tel nasigère
Sans s’écrier : « Oh ! Non, vraiment, il exagère !»
Puis on sourit, on dit : « Il va l’enlever… »
Mais Monsieur de Bergerac ne l’enlève jamais.
Le Bret, hochant la tête :
Il le porte, et pourfend quiconque le remarque ! »
Acte I, Scène 2, Vers 104 à 120
La laideur de Cyrano de Bergerac ne peut être dissimulée, mais le tempérament du héros, rempli de fierté, lui fait affronter les moqueries, allant même jusqu’à revendiquer son nez, et en faire le porte-étendard de sa bravoure. En condensant la laideur en un seul trait physique, qui est directement visible sur la scène, Rostand introduit son thème tragique : Cyrano est condamné à aimer sans retour la femme qu’il aime.
Le néo-romantisme
L’intrigue tient dans le triangle amoureux Cyrano-Roxane-Christian : les deux hommes sont amoureux de la même femme. Mais le premier est trop laid, le second est trop sot et, partant, aucun des personnages du triangle ne pourrait jamais connaître le bonheur.
Chacun des trois manifestent des caractéristiques propres aux héros romantiques : dignité, honneur et courage :
- Roxane tente par tous les moyens de sauver la vie de celui qu’elle aime, jusqu’à débarquer sur le champ de bataille
- Christian va à la mort car il a trop conscience de son infériorité et ne peut supporter le poids du mensonge
- Cyrano incarne la plus grande générosité d’âme et le plus grand dévouement : il prête à son ami sa plume pour séduire la femme qu’il aime lui-même, et le protège parce qu’elle l’aime. Jusque dans la mort, il sera respectueux.
Ces sacrifices héroïques les font rentrer dans la catégorie romantique. Un parallèle pourrait être possible avec Hernani de Victor Hugo, drame romantique fondateur qui met également en scène un triangle amoureux.
Découvrez-en plus en cours francais.
Une pièce de cape et d’épée
Le roman de cape et d’épée est originaire d’Espagne, contenant pléthore de violence et de rebondissements, tels qu’enlèvements ou duels… Dans l’espace littéraire français du XIXème siècle, l’expression se rapporte à un roman historique publié en feuilleton dans les journaux, se déroulant généralement au XVIIème siècle à partir d’intrigues politiques et amoureuses.
Evidemment, on ne peut que penser au roman d’Alexandre Dumas de 1844, Les Trois Mousquetaires ; mais on peut également citer Le Bossu de Paul Féval (1855) ou encore Le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier (1863).
De fait, on retrouve un Cyrano qui manie l’escrime à la perfection et qui se fait craindre de ses ennemis : on s’effraie de ses colères, on admire son adresse à l’épée, on respecte ses interdictions. L’apothéose de son génie – et de son caractère de personnage – réside assurément dans la scène où Cyrano parvient à battre son adversaire en duel alors qu’il compose un poème.
Un témoignage historique
Savinien de Cyrano, qui a inspiré Edmond de Rostand, est contemporain de l’époque du règne de la Préciosité. Il s’agit d’un courant littéraire provenant de cercles aristocratiques envieux de civiliser la brutalité des rapports sociaux, à l’heure de la Fronde, où l’on transperçait des corps pour une simple broutille. A la vulgarité de l’escrimeur, la réponse du noble est l’amabilité, le langage raffiné : les joutes seront verbales ou ne seront pas.
Ce témoignage d’Histoire influence les trois personnages principaux :
- Roxane attend de Christian qu’il la séduise selon les codes de la préciosité galante. Elle ne pourrait tomber sous le charme d’un courtisan incapable de le faire, lequel serait assurément une brute infréquentable. Les premières répliques de la scène du balcon, à l’acte III, le font voir ; il faut l’intervention de Cyrano pour qu’elle retrouve plaisir à être séduite. A ce titre, n’est-ce pas Roxane qui rend impossible l’amour qu’on lui porte ?
- Christian est l’antithèse de Cyrano : beau et sans esprit, tandis que notre héros est laid et lettré. Il est donc, par voie de conséquence, l’anti-précieux. Mais – et c’est la subtilité de son personnage romantique – il est suffisamment sensible et intelligent pour souffrir de n’être pas aimé pour ce qu’il est.
- Cyrano connaît parfaitement les codes poétiques et amoureux : il est l’image parfaite de l’idéal précieux et galant. Mais il est aussi celui qui manie avec génie son épée, digne héritier du plus grand chevalier de l’amour courtois, qui prouvait son amour par sa bravoure. Il incarne toutes les époques de l’idéal amoureux, échappant aux reproches qu’on adresse aux hommes trop mièvres. Mais son nez fait rire les précieuses qu’il entendrait séduire… L’idéal de sa galanterie se révèle dans son sacrifice pour le bonheur de Roxane.
Soyez le premier a laisser un commentaire