Appuyez sur “Entrée” pour passer au contenu

Les deux coqs analyse

les deux coqsVoici un commentaire composé de la fable « Les deux coqs » de Jean de la Fontaine.

« Les deux coqs » : Introduction

Sous le règne de Louis XIV, Jean de la Fontaine met en place à travers ses Fables une critique de la société. (Voir mon analyse du recueil Fables de La Fontaine)

Les fables appartiennent au sous-genre de l’apologue, court récit illustrant une morale. L’apologue répond donc à deux objectifs : plaire et instruire.

Cliquez ici pour lire « Les deux coqs »

Problématiques possibles à l’oral :

♦ En quoi cette fable est-elle un apologue ?
♦ Quelles sont les critiques présentes dans « Les deux coqs » ?
♦ Comment la morale se déploie-t-elle dans cette fable ?
♦ Comment La Fontaine utilise-t-il la réécriture ?
♦ Quels sont les registres présents dans « Les deux coqs » ?

I – « Les deux coqs » : Une parodie

A – Une réécriture parodique de la guerre de Troie…

« Les deux coqs » de La Fontaine est une réécriture de la guerre de Troie.

La réécriture est fréquente au XVIIe siècle : depuis la Renaissance, les auteurs s’inspirent des mythes grecs pour les réécrire.

Dans cette fable, La Fontaine met en place une métaphore filée de la Guerre de Troie racontée par Homère dans L’Iliade.

L’intertextualité commence au vers 3, dans le premier hémistiche : « Amour, tu perdis Troie ».

S’ensuivent des références à Hélène de Troie (v. 9) qui est l’objet de la Guerre, et au « Xanthe » (v.5), le fleuve qui coule près de Troie, et qui, selon la légende, a été rougi par le sang des batailles.

Mais, dans «Les deux coqs», ce modèle est détourné.

B – Le registre burlesque

L’Iliade, récit de guerre épique, est ici détourné par la Fontaine qui en fait une réécriture burlesque. La Fontaine traite donc d’un sujet noble (L’Illiade) dans un style vulgaire (une bataille de coqs).

1 – L’animalisation des protagonistes

La Fontaine choisit d’animaliser ses protagonistes.

Pour cela, il ne choisit pas des animaux nobles qui rendraient justice au mythe fondateur de la Guerre de Troie (lions, tigres, …), mais des coqs.

READ  Création du premier navigateur doté d'une interface graphique

Il transpose donc le récit héroïque dans la basse-cour : il s’agit d’un traitement burlesque de l’histoire (un sujet grand, haut, traité de façon basse).

2 – Une parodie de la poésie épique

L’utilisation du champ lexical de la guerre (« guerre allumée » , « querelle envenimée » , « vainqueur » , « vaincu » , « gloire » , « défaite » ) et les références à la mythologie grecque (Troie, Hélène) sont cocasses.

En effet, La Fontaine pastiche la poésie épique qui fait traditionnellement l’éloge des héros de guerre. Il feint de donner de la grandeur à cette querelle de basse-cour pour mieux la tourner en dérision.

Dans le récit de la guerre de Troie, Hélène a certes déclenché la guerre, mais les héros se battent également pour des motifs supérieurs.

Dans « Les deux coqs », les protagonistes ne se battent plus que pour une poule. La Fontaine renvoie la bataille des deux coqs à une simple coquetterie.

3 – L’héroïsme tourné en ridicule

L’héroïsme est également tourné en ridicule, puisque le coq qui réussit à gagner la poule, et donc la guerre, se fait attraper par un vautour.

Double ridiculisation de l’héroïsme, puisqu’à cause de la mort du premier coq, le second devient le nouveau héros : non grâce à son entrainement, mais grâce au hasard.

Ce retournement de situation est d’autant plus ridicule que La Fontaine consacre sept vers (v.10 à 17) à la préparation de la revanche du coq. Or cette préparation est rompue brutalement en un hémistiche, au vers 18 :
« Il n’en eu pas besoin. ».

Le point qui sépare les deux hémistiches du vers 18 met encore plus en avant cette rupture ironique. Malgré toute sa préparation, le coq vaincu ne doit rien à sa force ou son courage.

C – Un récit rythmé

« Les deux coqs » est un récit plaisant et rythmé par la structure poétique de la fable.

L’hétérométrie (juxtaposition de vers de différentes longueurs, ici alexandrins et octosyllabes) maintient l’attention du lecteur.

Ex : les deux premiers vers de la fable, qui exposent le cadre initial :
« Deux coqs vivaient en paix : une poule survint,/
Et voilà la guerre allumée. »

Le passage d’un vers long (v.1) à un vers court (v.2) a un effet de chute, et d’accélération du récit.

Ce vers court met l’accent sur les conséquences de la survenance de la poule : la guerre prend toute la place du vers.

Dans ce premier vers, le rythme est également créé par les changements de temps : on passe d’un imparfait de durée (description) au passé simple (action). Les deux points marquent aussi la rupture brutale du passage de la paix à la guerre.

READ  Conversion km h en noeuds

La parodie est également renforcée par de subtils jeux au niveau des rimes.

Ainsi aux vers 26 et 27, « coquet » rime avec « caquet ». La répétition de ces sons occlusifs en [k], proches du terme « coq »,  renforce le ridicule du personnage vainqueur.

Transition : La fable « Les deux coqs » parodie la poésie épique. Mais cet apologue n’a pas pour seul but de plaire : il vise également à critiquer pour mieux instruire.

II – Les deux coqs : un récit à visée critique

A – Une critique de l’héroïsme et de la guerre

La Fontaine critique dans cette fable l’héroïsme et la guerre.

1 – La morale explicite

La morale explicite, qui occupe les quatre derniers vers, est mise en exergue par un passage du passé simple à un présent de vérité générale :

La fortune se plaît à faire de ces coups;
Tout vainqueur insolent à sa perte travaille.
Défions-nous du Sort, et prenons garde à nous
Après le gain d’une bataille.

La morale semble tout d’abord prévenir le lecteur contre les dangers du hasard (« Défions-nous du sort » ).

Si le héros est défini par le hasard, faut-il essayer à tout pris d’être un héros ? Le hasard peut aussi bien faire que défaire.

Cette mise en garde pourrait s’adresser au roi Louis XIV, qui est constamment en campagnes militaires : la victoire est souvent due à du simple hasard, et il ne faut pas trop le tenter en multipliant les guerres.

2 – La morale implicite

Cependant, chez La Fontaine, les morales explicites ne sont pas à suivre au pied de la lettre. Elles cachent souvent d’autres morales. ( Par exemple, « La raison du plus fort est toujours la meilleure » n’est pas la véritable morale du « loup et l’agneau »).

Dans « Les deux coqs », la Fontaine dresse une critique de la guerre, qui se déclenche pour des broutilles (une poule) et se termine de façon inattendue et imprévisible (le vautour).

Cette critique s’adresse essentiellement à Louis XIV, qui lance de nombreuses campagnes militaires afin de gagner la gloire et les terres.

 B – Une critique des femmes

La critique des femmes est également très présente dans la fable.

Que ce soit dans le modèle antique ou dans la réactualisation du mythe, ce sont des personnages féminins qui déclenchent la guerre : Hélène et la poule.

La femme est décrite comme vaine : son seul attribut est sa beauté (« Hélène au beau plumage »). L’emploi du terme péjoratif « caquet » au v. 27 souligne leur sottise.

READ  Profites bien de tes vacances

L’inconstance des femmes est pointée dans le récit : le nouveau vainqueur « eut des femmes en foule » (v.28). Ces dernières sont volages et attirées par le pouvoir.

On peut faire le lien avec les nombreuses maîtresses de Louis XIV, souvent accusées de détourner le roi de ses devoirs de monarque.

 C – Une critique de la cour

Dans « Les deux coqs », la société de cour est également moquée.

Ainsi, elle apparaît aux vers 7 et 8 :
« Le bruit s’en répandit par tout le voisinage./La gent qui porte crête au spectacle accourut ».

A travers la métonymie « la gent qui porte crête », le fabuliste compare les courtisans à la basse-cour.

Pour La Fontaine, les courtisans ne sont que des profiteurs et des opportunistes qui cherchent à tout prix à se faire remarquer par le roi pour en obtenir les faveurs : ils sont méprisables ; ils représentent la « basse-cour ».

Le vers 8 dénonce également la société de spectacle qu’est Versailles : les courtisans cherchent à colporter les ragots.

 Les deux coqs : conclusion

A travers cet apologue, La Fontaine souhaite plaire et instruire.

Il réécrit le mythe de la guerre de Troie  dans un registre burlesque, tout en invitant le lecteur à tirer des enseignements de sa lecture.  On comprend ainsi que les fables soient adressées au Dauphin : à travers ses apologues, La Fontaine cherche à former le futur roi.

Explications sur les Fables de La Fontaine en vidéo :

Tu étudies la Fontaine ? Regarde aussi :

♦ Le classicisme [vidéo]
♦ L’apologue : définition [vidéo]
♦ Argumentation directe et indirecte [vidéo]
♦ La cigale et la fourmi (analyse)
♦ L’huître et les plaideurs (analyse)
♦ Les Animaux malades de la peste (analyse)
♦ Le pouvoir des fables (analyse)
♦ La cour du lion (analyse)
♦ Le curé et le mort (analyse)
♦ Le rat qui s’est retiré du monde (analyse)
♦ Le coche et la mouche (analyse)
♦ La mort et le bûcheron (analyse)
♦ Les deux pigeons (analyse)
♦ Le chêne et le roseau (analyse)
♦ Le chat, la belette et le petit lapin (analyse)
♦ Le loup et le chien (analyse)
♦ Le savetier et le financier (analyse)
♦ Les deux amis (lecture linéaire)
♦ Les grenouilles qui demandent un roi (analyse)
♦ Les membres et l’estomac (analyse)
♦ Les obsèques de la lionne (analyse)
♦ Le loup et l’agneau (analyse)
♦ Le lion et le moucheron (analyse)
♦ La laitière et le pot au lait (analyse)
♦ Le vieillard et les trois jeunes hommes (analyse)
♦ Le singe et le léopard (lecture linéaire)
♦ Les femmes et le secret

Soyez le premier a laisser un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *