Mort d’un milicien de Robert Capa
Dès sa publication, en 1936, cette image saisissante est devenue une icône.
Peu de clichés nous confrontent avec autant de violence à la mort. Cette célèbre photographie est l’œuvre d’un tout jeune reporter de guerre hongrois, Robert Capa (1913-1954), qui, à 22 ans, est parti couvrir la guerre d’Espagne opposant les Républicains aux troupes franquistes. Sur le front d’Andalousie, il saisit dans l’objectif un soldat des milices républicaines fauché par une balle, dans un coin de campagne aride et isolé. Quelques jours plus tard, le 23 septembre 1936, le magazine Vu, son commanditaire, publie l’image sans légende dans un numéro spécial sur la guerre civile qui ravageait la péninsule.
Lorsqu’elle illustre un article dans Paris-Soir, un an plus tard, son auteur, Antoine de Saint Exupéry, lui confère déjà une portée plus générale (« Le front est animé par une fusillade lointaine, incohérente et universelle« ). Selon Françoise Denoyelle, historienne de la photographie, ce cliché accède, dès ces publications ultérieurs « et par sa symbolique […] au rang d’icône emblématique de la guerre d’Espagne. »
Des polémiques fusent à partir de 1970 : est-ce une photo de Robert Capa ou de sa compagne Gerda Taro ? Qui est ce soldat ? Est-ce une mise en scène ? Les débats n’ont jamais abouti, les négatifs ayant été perdus. Mais ils n’ont pas réussi à déprécier sa valeur photographique et historique.
L’horreur au milieu d’un paysage grandiose
Une fin d’après-midi, sous le soleil, comme l’indique l’ombre du soldat. Une paysage majestueux et désolé d’Andalousie… Un bel endroit pour mourir ? Dans son livre L’Oeil naïf, le philosophe et écrivain français, Régis Debray se dit surpris par l’éclairage et les nuages rondelets, tout autant que par la chaleur de la terre et l’immensité des horizons : « Il y a autour de ce sacrifice lumineux, suspendu en plein ciel, quelque chose de solaire et d’océanique, qui le soustrait à la rubrique « horreur de la guerre ». »
Entre la vie et la mort
Si cette photo est devenue une icône, c’est bien parce qu’elle a su immortaliser un instant fugitif ; le passage de la vie à la mort, terriblement matérialisé par la chute de l’homme sur l’herbe. Le temps est comme suspendu. Le soldat tombe, lâche son fusil, emblème de sa lutte contre le fascisme, et cette photographie symbolise rapidement l’Espagne et sa République abandonné par les démocraties. Deux héros s’offrent ici à nous : le milicien et le reporter. Tous deux mettent leur vie en péril : au service des valeurs républicaines, pour l’un, au service de la liberté de l’information, pour notre photographe.
Juste un peu flou
Le décor de cette scène est presque entièrement flou. Signe tangible que la photo est une image d’information, prise sur le vif. On renonce à l’esthétisme parfait chez les reporters parce que le flou est également une preuve d’authenticité. Il deviendra même la marque de fabrique des photojournalistes. Ainsi, en 1944, Capa couvre le débarquement de Normandie. Le magazine Life publie ses images et affirme qu’en raison du tremblement du photographe, elles sont « justes un peu floues ». Par dérision, Capa reprendra ses mots pour titrer ses mémoires de guerre.
Au cœur de l’action
Comment Capa a-t-il pu prendre cette image de si près ? Grâce à une innovation de l’époque : l’appareil Leica, petit et léger, que son ami Henri Cartier-Bresson utilisait aussi. Capa se déplace ainsi aisément. Il semble ici aux pieds du soldat chancelant, isolé dans le cadre, légèrement en contre-plongée, ce qui renforce la proximité du reporter et du milicien, et place le spectateur en plein cœur de l’action. Illustration concrète du célèbre conseil de Capa : « Si ta photo n’est pas bonne, c’est que tu n’étais pas assez près ».
Margaux Duquesne
Pour Arts Magazine, rubrique « Anatomie d’un chef-d’œuvre« , septembre 2009.
Photo prise le 24 novembre 2022 qui montre des portraits de victimes du régime iranien placés sur le sol alors que des manifestants agitent les drapeaux de l’Iran d’avant la révolution islamique devant le siège des Nations unies lors d’une session spéciale du Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur la situation en Iran, à Genève.
La justice iranienne a annoncé de nouvelles condamnations à mort alors que des appels ont été lancés pour trois jours de grève et de manifestations du lundi 5 à demain mercredi.
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Avec notre correspondant à Téhéran, Siavosh Ghazi
Au total, quinze personnes étaient jugées pour le lynchage d’un milicien islamiste ou bassidji, il y a quelques semaines. Cinq personnes ont été condamnées à mort et les autres à de lourdes peines de prison.
La vidéo du lynchage a largement circulé sur les réseaux sociaux et dans les médias officiels et a été utilisée dans le procès. On y voit une trentaine de personnes attaquer un jeune à coups de couteau et de pierres en lui donnant également des coups de pieds.
Ces nouvelles peines de mort ont été annoncées alors que quatre manifestants ou « fauteurs de troubles », selon les autorités, ont été pendus dimanche matin.
De même, le chef du pouvoir judiciaire a annoncé la prochaine exécution de personnes reconnues coupables d’assassinats lors des manifestations des dernières semaines.
► À lire aussi : Guerre de communication sur les enseignements du premier jour de grève en Iran
Un mercredi qui s’annonce crucial
Ce mardi, il y avait encore moins de magasins fermés dans la capitale que lundi. Hier soir, des petits groupes de jeunes ont manifesté dans plusieurs quartiers de Téhéran, bloquant certaines avenues et autoroutes de la capitale.
Mercredi 7, qui correspond à la Journée de l’étudiant, est sans doute crucial. De nombreux appels ont été lancés pour une mobilisation plus importante. Mais le pouvoir ne baisse pas le bras puisque le président Raïssi doit prononcer un discours à l’université de Téhéran.
Enfin, le porte-parole de la Justice a annoncé que 1 200 manifestants arrêtés ces dernières semaines ont été libérés.
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Iran: le « filleul » de Clémentine Autain exécuté pour la mort d’un milicien des Gardiens de la Révolution
La députée LFI Clémentine Autain, le 27 août 2022 à Blois – GUILLAUME SOUVANT © 2019 AFP
La justice iranienne a annoncé samedi la pendaison le même jour de deux hommes reconnus coupables d’avoir tué un paramilitaire lors des manifestations déclenchées par le décès en détention de la jeune Mahsa Amini. La députée LFI Clémentine Autain assure sur Twitter que l’un des deux hommes est son « filleul » qu’elle avait parrainé via une ONG.
Clémentine Autain a précisé à Libération avoir « parrainé » le jeune homme exécuté dans le cadre d’une opération nommée « Stop exécution » et « menée par deux avocates iraniennes en lien avec des ONG ».
Les ONG dénoncent « une justice expéditive »
Mohammad Mehdi Karami et Seyed Mohammad Hosseini sont accusés d’avoir tué Rouhollah Ajamian, un membre de la milice des Bassidji liée aux Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de l’Iran, le 3 novembre dernier. Ils « ont été pendus ce matin » samedi, a annoncé l’agence de l’autorité judiciaire Mizan Online.
Un tribunal en première instance avait condamné à mort les deux hommes le 4 décembre et la Cour suprême avait confirmé le 3 janvier leurs peines, une justice qualifiée d' »expéditive » par des ONG de défense des droits humains.
La députée avait « parrainé » le jeune homme avec une ONG
La députée LFI Clémentine Autain a réagi à cette annonce sur Twitter en faisant part de sa « colère, tristesse immense et pensées affligées ». Elle affirme dans le même temps que l’un des deux hommes tués est son « filleul ».
« Je viens d’apprendre que mon filleul Mohammad Mehdi Karami, 22 ans, a été exécuté (samedi) par le gouvernement », écrit-elle.
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L’élue de Seine-Saint-Denis avait alerté à plusieurs reprises ces dernières semaines sur la condamnation à mort de ce jeune homme et son exécution à venir. « La peine de mort de mon filleul Mohammad Mehdi Karami a été confirmée ce matin », écrivait-elle déjà le 3 janvier dernier.
« Nous sommes 150 parlementaires français à avoir parrainé des Iraniens condamnés par le régime dictatorial », explique-t-elle.
Condamnations internationales
Ces dernières exécutions surviennent malgré une campagne d’ONG appelant Téhéran à épargner Mohammad Mehdi Karami et Seyed Mohammad Hosseini, Amnesty International ayant notamment dénoncé un procès « inéquitable ».
L’ONU a dénoncé des pendaisons « choquantes » qui portent à quatre le nombre d’exécutions depuis le début du mouvement de contestation en Iran à la mi-septembre.
L’UE s’est dit pour sa part « consternée », selon un communiqué des services de son chef de la diplomatie Josep Borrell. Elle a aussi appelé l’Iran « à mettre immédiatement un terme » à l’exécution de manifestants, tandis que la France a dénoncé des exécutions « révoltantes ».
Depuis le début du mouvement de contestation, 14 personnes ont été condamnées à mort en lien avec les manifestations, selon un décompte de l’AFP basé sur des informations officielles. Trois nouvelles condamnations à mort liées aux manifestations ont encore été annoncées ce lundi.
Article original publié sur BFMTV.com
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