La Terre porte le nom de planète bleue parce que c’est ainsi qu’elle apparaît depuis l’espace du fait que sa surface est couverte d’eau à 70 %. Mais si l’eau est abondante, l’eau douce ne représente que 2.53 % de toute l’eau de la planète et seule l’eau douce soutien la vie terrestre, notamment la vie humaine. L’eau douce est donc un bien rare et précieux qui, s’il est contaminé, peut ne plus pouvoir remplir ses différents rôles écologiques. Or, l’humanité s’approprie une part significative de l’eau douce, la retire aux écosystèmes terrestres dont nous dépendons tant, la rend inaccessible, y compris pour notre propre utilisation, et la contamine. Dans ce contexte, il est crucial de savoir comment l’eau est répartie sur Terre et dans quelles proportions.
Les sources d’eau
Le volume total d’eau que porte la Terre est de 1,4 milliards de km3 ou 1,4 billions de m3 (1,4.1012 m3). De ce volume, 2,53 %, soit 35 millions de km3 (ou 35 Gm3), est de l’eau douce (tableau ci-dessous). La majeure partie de l’eau de la planète est salée et est contenue dans les différentes mers et océans. Une petite partie d’eau salée se retrouve aussi dans des aquifères souterrains (1 %) et dans des lacs (0,006 %).
Non seulement l’eau douce est présente en très faible proportion, mais la plus grande part de cette fraction est inaccessible et est stockée sous forme solide dans les glaciers de l’Antarctique (61,7 % de l’eau douce) et du Groenland (6,7 %), dans les glaciers montagneux (0,12 %), ainsi que dans le pergélisol et le sous-sol (0,86 %). Cette eau est non renouvelable. Par comparaison avec les ressources en énergie, l’eau non renouvelable est parfois qualifiée de « fossile » [1].
Une partie de l’eau douce contenue dans les aquifères (30 %) est également non renouvelable, mais une partie est renouvelable quand les aquifères sont alimentées par des rivières ou par les écoulements. Certains aquifères, parfois pourvus d’eau non renouvelable, sont accessibles et sont exploités pour des usages domestiques, agricoles ou industriels, tandis d’autres aquifères sont inaccessibles.
L’eau douce renouvelable se retrouve également dans les rivières (0,006 % de l’eau douce), sous forme d’humidité dans les sols (0,047 %), et dans l’atmosphère (0,04 %) sous forme de vapeur d’eau et de pluie. Une partie de l’eau douce n’est pas renouvelable. La partie renouvelable est définie par le cycle de l’eau.
La disponibilité de l’eau par pays par personne et par année est représentée sur la Figure 2. On peut également y voir les régions les plus soumises à un stress hydrique. Les régions les plus à risque sont le nord et le sud de l’Afrique, l’Asie, notamment l’Inde et le Proche-Orient.
L’utilisation de l’eau
L’humanité utilise une quantité d’eau grandissante, parfois à un rythme approchant ou supérieur au taux de renouvellement des stocks. Bien que globalement le volume d’eau sur Terre soit constant, les problèmes surviennent parce que l’eau devient inaccessible, les sources d’eau potable diminuent ou se tarissent, mettant ainsi les régions en état de stress hydrique. L’utilisation massive d’eau se traduit par de grands défis actuels et à venir, des problèmes qui sont aggravés par le réchauffement planétaire. Encore aujourd’hui, 800 millions de personnes dans le monde n’ont pas accès à de l’eau potable ou de qualité suffisante pour leur subsistance et pour les services sanitaires [4]. L’eau est également utilisée pour diluer les rejets industriels tandis que l’industrie et l’agriculture sont à l’origine de contamination.
L’eau douce étant inégalement répartie à travers le globe et son utilisation étant parfois gérée inadéquatement, certaines régions sont caractérisées par une rareté de l’eau ou sont déjà en pénurie (Afrique sub-saharienne, Proche-Orient, Midwest américain). Le manque d’eau sera de toute évidence un des problèmes les plus importants du 21e siècle [5]. Le prélèvement dans certaines rivières est tel que le débit n’est plus suffisant pour alimenter les deltas. Ces pénuries causées d’origine anthropiques pourraient par ailleurs être amplifiées par le réchauffement climatique (sécheresses, modifications du régime de précipitations). Celui-ci pourrait par ailleurs amplifier les inondations et autres événements extrêmes.
Finalement, l’appropriation de l’eau par l’humanité atteint des niveaux tels qu’elle prive les écosystèmes d’une partie de cette eau. Alors que la vie repose sur l’eau, un apport insuffisant en cette ressource essentielle pourrait contribuer à diminuer la qualité ou le nombre de services que ces écosystèmes fournissent. C’est ainsi qu’a été définie la notion de pic d’utilisation de l’eau « écologique » [1], i.e. le point où l’utilisation de l’eau par les êtres humains nuit à la nature.
Dans le domaine de la gestion de l’eau, on distingue l’eau utilisée de façon consomptible ou non consomptible. La première désigne l’eau qui après utilisation a été rendue inutilisable à court terme dans le bassin hydrologique d’où elle a été tirée. C’est par exemple le cas si l’eau a été évaporée, incorporée dans des produits industriels ou dans des cultures, contaminée ou consommée par les êtres humains. L’eau utilisée de façon non consomptible réfère par exemple à l’eau utilisée pour les rejets domestiques, si cette eau a été collectée et traitée. L’eau utilisée pour le refroidissement des installations industrielles, des bâtiments publics ou commerciaux, ainsi que l’eau utilisée pour la production d’énergie (barrages), sont également dites non consomptibles [6].
Bibliographie
[1] Peter H. Gleick et Meena Palaniappan, Peak water limits to freshwater withdrawal and use, Proceedings of the National Academy of Science (2010) 107 11155–11162. (doi: 10.1073/pnas.1004812107).
http://www.pnas.org/content/early/2010/05/20/1004812107.abstract
[2] Water – Facts and trends, World Business Council for Sustainable development (2005) http://www.wbcsd.org/Pages/EDocument/EDocumentDetails.aspx?ID=137
[3] Global waterstress and scarcity, PNUE (2008) http://www.unep.org/dewa/vitalwater/article69.html
[4] Les progrès en matière d’eau potable et de systèmes sanitaires, Institut EDS (2012)
http://www.ihqeds.ulaval.ca/14501.html?tx_ttnews%5Btt_news%5D=958&cHash=525fcfa0aa6e1481a1953915b0d1f46e#.Um5J9PlWySo
UN Millennium Development Goal Drinking Water Target is Met, PNUE (2012) http://www.unep.org/NewsCentre/default.aspx?DocumentID=2676&ArticleID=9068
[5] Water scarcity, International Decade for Action “Water for Life” 2005-2015, Département d’économie et des affaires sociales des Nations unies http://www.un.org/waterforlifedecade/scarcity.shtml
[6] Economic valuation of water resources in agriculture From the sectoral to a functional perspective of natural resource management, FAO Water Report (2004) 27 p. 2. http://www.unwater.org/downloads/wr27e.pdf
171 % de la surface de la Terre est recouverte par les mers et les océans, ce qui lui vaut son surnom de « planète bleue ». Cette eau salée représente 97,4 % de l’eau présente sur notre planète (figure 1) et est en perpétuel mouvement. Les océans sont en effet constitués de masses d’eau dont la température et la salinité, donc la densité, varient en fonction du temps et de l’espace. Le déplacement de ces masses d’eau à l’échelle du globe constitue la circulation thermohaline globale* (figure 2). Le moteur principal de cette circulation est la formation d’eaux profondes, qui a lieu dans quelques régions de forte évaporation et/ou refroidissement : principalement en Mer du Groenland (Océan Arctique) et en Mer du Labrador (Atlantique Nord), mais aussi, dans une moindre mesure, en Mer de Weddell (Océan Austral) et au Nord-Ouest de la Méditerranée. Cette formation d’eau profonde est particulièrement étudiée en Méditerranée, car la facilité d’accès de cette région en fait un cas d’étude idéal de ce processus, qui joue, de plus, un rôle important dans le fonctionnement des écosystèmes marins méditerranéens. Les eaux présentes en surface dans ces régions y subissent une forte augmentation de leur densité. Près du pôle Nord, ces eaux denses peuvent ainsi atteindre, au moment de leur formation en surface, la température de congélation de l’eau de mer (environ-2°C du fait de sa teneur en sel). Elles plongent alors en profondeur, entraînant des eaux avoisinantes moins froides avec lesquelles elles se mélangent, et s’écoulent le long du plancher océanique*, constituant la branche profonde de la circulation thermohaline. Ces eaux profondes, dont la température varie entre 2°C et 4°C, sont réchauffées au niveau des tropiques et remontent en surface dans les différents océans de la planète (Pacifique, Indien et Atlantique), atteignant des températures de l’ordre de 30°C. Elles sont finalement ramenées vers le Nord de l’Atlantique par le Gulf Stream*. Le temps de parcours de cette boucle d’eau salée, qu’on appelle aussi « le tapis roulant océanique », est de l’ordre du millier d’années. L’eau se déplaçant ainsi à travers les océans permet le transport de la chaleur reçue à l’équateur jusqu’aux pôles. Elle joue donc un rôle majeur dans le fonctionnement du climat.
2Sur les 2,6 % d’eau douce restante dans l’hydrosphère, 2,0 % sont gelés de façon quasi-permanente dans les calottes polaires et glaciers (la cryosphère*). Finalement, seule 0,6 % de l’eau présente sur Terre est de l’eau douce disponible, qui contient donc moins de 2 grammes par litre de sels minéraux dissous. Cette eau douce est répartie de façon extrêmement inégale à la surface des continents et sa disponibilité à chaque endroit du globe est liée au bilan entre les précipitations et l’évaporation, c’est-à-dire l’écoulement. Les régions du globe qui présentent un déficit permanent d’eau se situent le long des tropiques et représentent 31 % de la surface totale des continents. C’est le cas des grands déserts d’Afrique du Nord (Sahara) et du Sud (Namib, Kalahari), d’Australie (Victoria), d’Asie Centrale (Gobi, Karakoum, Taklamakan), d’Arabie, d’Amérique du Nord (Basse Californie) et du Sud (Atacama), mais aussi de certaines régions polaires boréales. Ces zones hyperarides reçoivent moins de 50 mm d’eau par an. Le reste des surfaces continentales présente un bilan annuel positif, les régions les plus arrosées se situant dans les zones tempérées et intertropicales. Dans les régions équatoriales, certaines zones (Amazonie, archipel indonésien, Afrique centrale) reçoivent plus de 2 000 mm d’eau par an.
3L’eau à la surface des continents (figure 2) se répartit dans les fleuves rivières, lacs (étendues d’eau naturelles), réservoirs (étendues d’eau artificielles), marais, tourbières*… L’Amazone est, de loin, le fleuve ayant le plus grand débit, soit de 15 % à 20 % de la somme totale du débit moyen annuel de tous les fleuves (36 000 km3/an). Ce débit est équivalent à la somme des sept fleuves ayant les plus grands débits : le Congo en Afrique, le Gange/Brahmapoutre en Asie, l’Orénoque en Amérique du Sud, le Yang-Tsé-Kiang en Chine, la Lena et la Lenisseï en Sibérie et le Mississippi aux États-Unis. De nombreux bassins sont transfrontaliers et couvrent près de 45 % des continents, ce qui peut représenter des défis pour la gestion de cette ressource. La majeure partie des lacs est située au-dessus de 50°N (figure 2), mais ceux qui ont la plus grande superficie (mer Caspienne, lac Supérieur, lac Victoria, mer d’Aral et lac Huron) sont à des latitudes plus basses. Un certain nombre de bassins ne sont pas ou peu mesurés directement et la distribution globale des lacs et leurs variabilités temporelles sont encore incertaines. Ainsi, l’utilisation de données satellitaires actuelles (GRACE, Jason-2, Landsat, SPOT…) et à venir (GRACE-II, ICESat-2, les Sentinel, SWOT) est cruciale (cf. III.32). Le suivi des eaux souterraines est plus complexe et celles-ci sont moins connues à l’échelle globale. Près de 900 km3/an seraient prélevés pour les activités humaines, dont la moitié en Asie.
4Les réservoirs d’eau douce continentaux et océaniques sont reliés à travers le cycle de l’eau. Ainsi ce sont environ 120 000 km3 /an d’eau qui alimentent l’ensemble des continents sous forme de précipitations, les deux tiers provenant de l’évapotranspiration* continentale. Le tiers restant est restitué par les océans et est transporté par l’atmosphère. Ce flux de 40 000 km3 /an est rendu à l’océan sous la forme de ruissellement, via les rivières, et d’échanges avec les eaux souterraines. L’océan, quant à lui, reçoit environ 390 000 km3 /an de précipitations dont les 9/10es sont issus de l’évaporation à la surface de l’océan. Le changement climatique actuel perturbe fortement ces équilibres fondamentaux de notre planète, qui font l’objet d’intenses recherches dans la communauté scientifique. Les tropiques, en particulier, sont sous surveillance renforcée depuis 2011 grâce à la mission spatiale indo-française Megha-Tropiques.
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